L'histoire

Terre, au-delà des années 5300.

Un siècle s'est écoulé depuis que les Enfants du Soleil ont pu être sauvés et quitter la Terre. Mais sur celle-ci, rien n'a changé. Tout sépare ceux des très hauts-niveaux, qui profitent du soleil, du ciel et de l'espace, et ceux des sous-niveaux, qui se terrent dans les sous-sol et ne connaissent rien ou presque de la surface et du ciel.

Plus que jamais les Ajusteurs se doivent de redoubler d'activités et ne peuvent baisser les bras. Surtout que d'étranges mutations et modification ne cessent d'apparaître chez les Humains. Au point que nombreux sont ceux qui pensent qu'elles sont artificielles, qu'elles ont été provoquées, tant elles sont rapides à naitre et se propager.

Dans le même temps, certains des plus riches et plus puissants de ce monde s'inquiètent, eux, de favoriser leur accès à l'espace en implantant des ascenseurs spatiaux qui permettront de s'affranchir des contraintes qu'imposent les navettes et les problèmes d'arrachement à la gravité pour ces dernières. Plus encore, l'un des puissants rêve de découvrir de nouvelles portes spatiales et, grâce à cela, de pouvoir conquérir des planètes colonisables où seule l'élite pourra s'installer, en se dotant de ces modifiés comme main d'œuvre et esclaves à tout faire.

C'est une étrange course qui se déroule, sans que l'on sache vraiment qui joue quel rôle et quels sont les enjeux réels des drames qui ne cessent de se dérouler. Au point que les Régulateurs se retrouvent en première ligne pour contrer une mystérieuse organisation adverse et ses Masques...

Extrait

Mai 5337. Al-qāhira-kabir, anciennement Masr (Le Caire).
Premier sur-niveau. Quartier Nuqta-Sud.

Les deux jeunes se glissèrent dans l’étroite bande entre les deux immeubles. Ici encore plus qu’ailleurs, la chaleur se faisait sentir. Elles avaient lentement quitté les sous-niveaux pour gagner discrètement les premiers bas-niveaux jusqu’au sixième où l’éclairage commençait à être plus puissant, où l’air était moins vicié, moins chargé de miasmes, où les odeurs putrides et les relents d’égouts étaient parfois moins forts. À cette hauteur, les gens vivaient un peu moins mal, parvenaient à survivre plutôt, avec des moments de répit. Au-dessus du dixième niveau, les conditions de vie étaient meilleures : nourriture, véhicules volants, hôpitaux, appartements et équipements. Tout était des plus agréables, y compris les vêtements sans accrocs ni rapiéçages.

Mais toutes deux s’intéressaient à autre chose : un logement d’apparence discrète, objet de toute leur attention. Il occupait les trois étages du niveau et un médecin y était installé. Un toubib particulièrement étrange qui, certes, offrait ses services aux plus démunis de ce quartier, mais qui disparaissait deux à trois jours par semaine, parfois plus, parfois moins, laissant le minuscule cabinet où il recevait habituellement sous la férule d’une jeune infirmière qui dispensait alors les soins courants.

Elles avaient réussi à envoyer un gamin se faire ausculter et étudier les lieux en se faufilant, non sans mal, au-delà de la salle d’examen. Grâce à mille et une autres astuces, elles avaient fini par découvrir où se trouvait la réserve de médicaments. Une pièce extraordinaire. Presque aussi importante que celle d’un hôpital d’un niveau supérieur. Du moins à leurs yeux.

– Tu es sûre d’y arriver, hein, Annaka ? murmura la fille à la peau noire, se pressant contre son amie basanée.

– Oui ! Je t’ai déjà dit. Ces ventilateurs basculent pour être nettoyés. Je peux passer. Sinon, je reculerai pour revenir ici.

La dénommée Annaka, fluette et petite, à l’apparence d’une adolescente sous-alimentée d’à peine quinze ans, renifla. Saisissant un dégrippeur dans la pochette de sa ceinture, elle se hissa sur le rebord du mur et débloqua au plus vite les six accroches de l’aérateur d’où sortait un air chaud et poisseux. Faisant descendre la mince plaque vers son amie, elle se glissa dans l’ouverture, lançant un simple : « À toi, Mélika ! ». L’autre la suivit en attrapant la main tendue et toutes deux se retrouvèrent dans un minuscule espace, humide d’eau croupie et tapissé de poussière.